Deux études, parues lundi 29 juin (1) dans le New England Journal of Medicine (NEJM), font la lumière sur le syndrome inflammatoire multisystémique chez les enfants (MIS-C), une mystérieuse maladie identifiée dans le cadre de la pandémie de coronavirus.
Ces travaux reposent sur le suivi de près de 300 enfants, adolescents et jeunes adultes de moins de 21 ans ayant attrapé la maladie Covid-19 entre mars et mai 2020. Ils font suite à l’alerte lancée fin avril par les autorités sanitaires anglaises et les Centres américains de prévention et de lutte contre les maladies (CDC) qui suspectaient une augmentation inhabituelle de patients souffrant de la maladie de Kawasaki atypique.
"La plupart des patients atteints de MIS-C ont des anticorps contre le SARS-CoV-2, et le virus est détecté dans une proportion plus faible. Une proportion relativement élevée de cas s'est produite chez les patients noirs, hispaniques et sud-asiatiques", précise Michael Levin, professeur de pédiatrie et de santé infantile internationale à l’Imperial College de Londres, dans un éditorial (2) publié par le NEJM.
Un millier de cas ont déjà été rapportés dans le monde en incluant ces nouvelles études, mais la maladie reste cependant très rare : 2 cas pour 100 000 personnes de moins de 21 ans. À titre de comparaison, "322 personnes de moins de 21 ans sur 100 000 ont été infectées par le SArS-CoV-2 au cours de la même période", indique le Pr Michael Levin.
Quels sont les symptômes du syndrome inflammatoire multisystémique chez les enfants ?
Le syndrome apparaîtrait plusieurs semaines après l’infection par le virus SARS-CoV-2. L'étude anglaise évoque 25 jours en moyenne, tandis que dans l'étude américaine (menée à New York), la majorité des cas se présente un mois après l'infection.
Ce syndrome hyperinflammatoire induirait "des manifestations dermatologiques, muco-cutanées et gastro-intestinales, associées à un dysfonctionnement cardiaque" :
- Plus de 80 % des enfants atteints par ce syndrome souffraient de troubles gastro-intestinaux (douleurs abdominales, nausées ou vomissements, diarrhée) ;
- Près de 60 % présentaient des éruptions cutanées, surtout les moins de 5 ans ;
- Tous avaient de la fièvre, très souvent depuis plus de quatre ou cinq jours ;
- Chez 80 % d’entre eux, le système cardiovasculaire semble impliqué (97% des patients présentaient une tachycardie et 8 à 9 % des enfants ont développé un anévrisme des artères coronaires).
La plupart des enfants étaient auparavant en bonne santé et ne présentaient pas de facteur de risque ou de maladie pré-existante.
80 % ont été admis en soins intensifs, 20 % ont reçu une assistance respiratoire invasive et 2 % sont décédés.
MIS-C et maladie Kawasaki : des points communs ?
Si les chercheurs reconnaissent des similitudes entre la maladie de Kawasaki et le syndrome inflammatoire multisystémique chez les enfants, ils insistent cependant sur leurs divergences. "Les patients atteints de MIS-C sont plus âgés et ont une inflammation plus intense et des lésions myocardiques plus importantes que les patients atteints de la maladie de Kawasaki", résume le Pr Michael Levin.
Par ailleurs, la maladie de Kawasaki (dans sa forme classique) "affecte généralement les enfants asiatiques de manière disproportionnée, indique les chercheurs. Tandis que le MIS-C associé à la Covid-19 semble survenir chez les enfants de toutes origines raciales ethniques".
De nouvelles études nécessaires pour identifier les causes et le traitement du MIS-C
L’origine de ce syndrome demeure un mystère. La piste envisagée est celle d’une réponse anormale du système immunitaire quelques semaines après l’infection à coronavirus : dans le cadre de l’infection par SARS-CoV-1, les anticorps peuvent effectivement augmenter la gravité de l'infection en déclenchant une inflammation ou en provoquant des lésions organiques.
Mais "les cliniciens sont confrontés à des problèmes de gestion difficiles car ils voient un large éventail de patients", explique le Pr Michael Levin. À ce jour, la plupart des patients ont été traités avec des agents qui se sont révélés bénéfiques dans la maladie de Kawasaki ou d'autres troubles inflammatoires.
Quels traitements peuvent empêcher la progression vers un choc et une défaillance multiviscérale ? Préviendra-t-il les anévrismes des artères coronaires ? Les enfants atteints d'une inflammation auto-résolue sont-ils à risque d'anévrismes et quel suivi cardiaque est nécessaire ? "De nouveaux essais seront nécessaires pour établir la thérapie appropriée", répond le spécialiste.
Sources :
(1) Multisystem Inflammatory Syndrome in U.S. Children and Adolescents , 29 juin 2020, The New England Journal of Medecine
(2) Childhood Multisystem Inflammatory Syndrome — A New Challenge in the Pandemic , 29 juin 2020, The New England Journal of Medecine